Accord UE–Singapour sur le commerce numérique : un levier pour les échanges transfrontaliers

Accord UE–Singapour sur le commerce numérique : un levier pour les échanges transfrontaliers

Ce qu’il faut retenir

Le 7 mai 2025, l’Union européenne et Singapour ont signé un accord sur le commerce numérique visant à faciliter les échanges de biens et services en ligne et les flux transfrontières de données. (1) Ce cadre juridique ambitieux doit renforcer la confiance des acteurs économiques et soutenir le développement d’un espace numérique sans barrières injustifiées.


L’accord sur le commerce numérique signé le 7 mai 2025 entre l’Union européenne et la République de Singapour établit des règles contraignantes pour favoriser les échanges numériques transfrontaliers, la libre circulation des données, la reconnaissance des contrats électroniques, la protection du code source et la cybersécurité. Cet article présente les objectifs de l’accord, les secteurs concernés, les garanties pour les entreprises et les consommateurs, ainsi que les prochaines étapes avant son entrée en vigueur.


1. Pourquoi un nouvel accord commercial entre l’UE et Singapour ?

L’accord sur le commerce numérique (Digital Trade Agreement - DTA) vient renforcer les liens commerciaux entre l’UE et Singapour, après la signature d’un accord de libre-échange (EUSFTA) en 2018. Il s’inscrit dans la suite du partenariat sur le commerce numérique (EUSDP), signé en 2023.

Malgré leurs différences de taille (450 millions d’habitants dans l’UE contre 5,9 millions pour Singapour) (2), les échanges commerciaux entre les deux parties à l’accord sont déjà très développés. Singapour est le hub commercial de l’Asie du Sud-est et la porte d’entrée vers les marchés des pays de la région. Singapour est également le premier partenaire commercial de l’UE en Asie du Sud-est. L’économie singapourienne est très orientée vers les services, notamment les services financiers. Enfin, l’Europe est très présente à Singapour, avec plus de 10.000 entreprises européennes qui y ont établi leur siège régional ou des filiales.

En contrepartie, cet accord doit permettre aux entreprises singapouriennes d’intensifier leurs échanges avec les Etats-membres de l’Union européenne.

Le DTA établit des règles contraignantes en matière d’échanges de biens et de services par voie électronique. Ainsi, en supprimant les barrières au développement du commerce par voie électronique, les règles définies par le DTA doivent permettre d’accélérer l’essor des relations commerciales entre l’UE et Singapour en contribuant à renforcer la confiance des entrepreneurs et des consommateurs ainsi que la sécurité juridique des transactions bilatérales.


2. Les objectifs de l’accord sur le commerce numérique (DTA)

    2.1 Les domaines concernés par l’accord

L’accord sur le commerce numérique a pour objet de faciliter les échanges commerciaux numériques et les flux transfrontières de données entre l’Union européenne et Singapour. 

Les domaines concernés couvrent les échanges commerciaux de biens et de services conclus par voie électronique, y compris les marchés publics. Ils comprennent par exemple les services de télécommunication, les services informatiques, les services financiers et d’une manière générale, toutes les transactions commerciales pouvant être réalisées par voie électronique.

On notera que le domaine de l’audiovisuel est exclu de cet accord.

    2.2 Les objectifs du DTA

Les objectifs du DTA sont multiples et couvrent notamment les domaines suivants :

    - Flux transfrontières de données : le DTA interdit les obligations injustifiées de localisation de données qui empêcheraient le transfert de données - personnelles ou commerciales, depuis ou vers le territoire d'une partie. Cette disposition ne remet pas en cause les réglementations respectives des parties en matière de protection des données personnelles ;

    - Interdiction permanente d’imposer des droits de douane sur les transmissions électroniques entre l’UE et Singapour ;

    - Reconnaissance de l'effet juridique (opposabilité) et de la validité des contrats conclus par voie électronique, y compris de la signature électronique et la facturation électronique ainsi que des procédures d’authentification ;

    - Protection des personnes physiques et morales contre l’obligation de divulguer du code source lors de l’importation, l’exportation, la distribution ou l’utilisation de logiciels. Cette obligation de divulgation est encadrée. Elle ne pourra être mise en oeuvre que dans un but légitime dans le cadre de procédures réglementaires ou judiciaires et conformément aux règles de procédures applicables dans la juridiction concernée ;

    - Protection des consommateurs contre les pratiques abusives, ou frauduleuses et l’activité de marketing en ligne non-sollicitée ;

    - Règles d’accès à internet garanties pour les consommateurs. Les fournisseurs d’accès internet doivent traiter les flux sans discrimination (principe de neutralité du net) ;

    - Application du principe de l’open data des données publiques permettant leur libre accès et réutilisation, y compris à des fins commerciales ;

    - Collaboration en matière de cybersécurité pour optimiser la réponse aux cyberattaques, identifier et limiter les intrusions et la dissémination de code malveillant.


       Le DTA pose un cadre de règles relatives au commerce numérique que l’UE et Singapour s’engagent à mettre en oeuvre pour développer un environnement juridique stable, exempt de barrières injustifiées et garant des droits et des obligations des personnes. 

Le DTA doit encore être ratifié par chacune des parties à l’accord avant d’entrer en application, dont l’approbation du Parlement européen.

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(1) Accord entre l'Union européenne et la République de Singapour sur le commerce numérique (https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-5854-2025-INIT/fr/pdf)
(2) Selon les chiffres de 2023

Bénédicte DELEPORTE
Avocat

Deleporte Wentz Avocat
www.dwavocat.com

Juin 2025